Le football est la discipline sportive, qui rassemble
davantage les peuples du monde entier et les différentes couches sociales,
qu’elles soient riches ou pauvres, mais en même temps il est paradoxalement
devenu l’un des moyens les plus importants de la manifestation et l’expression
du racisme.
Si l’on peut tenter de comprendre la persistance
du racisme dont sont victimes les noirs par des facteurs historiques notamment
l’esclavage, la colonisation, le retard de l’Afrique sur le plan technologique
et économique, nous pouvons cependant être surpris désagréablement du racisme
dont sont victimes les footballeurs noirs. Dans cette discipline sportive on peut compter, parmi les meilleurs sportifs qui ont régalé la planète entière par leur
génie et technique, beaucoup de joueurs noirs
notamment le roi Pele, le meilleur jouer de tout temps, Eusobio, Abedi
Pele, Georges Weah, Ronaldo, Ronaldinho, Samuel Eto, Lilian Thuram, Didier Drogba, Yaya Toure etc.. Les exploits
techniques et les brillants parcours réalisés par tous ces grands joueurs noirs, parmi tant
d’autres, tellement nombreux qu'on ne peut pas les citer ici, devraient, normalement,
contribuer à lutter contre les préjugés, les clichés et le racisme dont sont
victimes les Africains. Au-delà de la couleur de la peau, leurs exploits
sportifs montrent que les qualités humaines notamment le don, le génie,
l’intelligence technique ou tactique ne sont l’apanage d’aucun peuple, mais ils
appartiennent à tous les groupes ethniques ou à toutes les races, pour ceux qui ne croient pas encore à
l’existence d’une seule espèce humaine. D’où
l’énigme du racisme dans le football. Comment peut-on aimer le football et
crier son sur un footballeur parce qu’il
a simplement la même couleur de peau que
Pele ou d’autres « génies
noirs » du football ?
De plus ce qui est encore étonnant, injuste et révoltant, ce sont les fils
du continent du football, l’Afrique, qui sont les victimes de ce type de racisme qui ne vise que les
footballeurs. Eh oui, l’Afrique est un continent de football où le ballon rond
rend heureux des millions d’enfants et
de jeunes qui n’ont pas autant de jouets et d’infrastructures sportives et de
loisirs que leurs homologues des pays riches ou moins pauvres. Comme la
pratique de football n’exige qu’une petite boule ronde que les enfants fabriquent
ou inventent parfois avec des moyens du bord, ou achètent à des prix très
abordables, il est devenu ainsi le sport roi, c'est-à-dire le plus pratiqué et
regardé dans le monde, même dans les contrées villageoises les plus lointaines
d’Afrique. Dans les villes en Afrique, beaucoup plus peuplés que les villages,
les jeunes désœuvrés, victimes de la déscolarisation et du chômage, s’adonnent,
avec passion, au football en jouant et en regardant surtout, les clubs et les
équipes nationales européennes. Quand ces jeunes africains supportent les clubs
tels que Real Madrid, FC Barcelone, l’inter de Milan , Milan AC, Liverpool,
Bayern de Munich, ce ne sont pas les couleurs de la peau des joueurs qui les intéressent et
qu’ils regardent. Ce sont plutôt leur jeu, le génie, l’art des joueurs, qu’ils admirent en les supportant au point de s’identifier aux
stars du ballon rond, jusqu’à porter leurs noms comme surnoms. C’est pourquoi
en Afrique et surtout en Guinée il y a beaucoup de jeunes qui se font appeler
Maradona, Platini, Zico, Socrates, Zidan, Messi, Christian Ronaldo, Baggio, Del Piero, Pirlo, Clinsman, Thomas hasler, Becken Bauer etc. Cette
passion du football des jeunes africains et leur adoration et adoption des
idoles du ballon rond dans leurs cœurs indépendamment des appartenances
raciales ou ethniques, religieuses, contrastent malheureusement avec le racisme
dont sont victimes les footballeurs d’origine africaine. Dans ce cas, ceux qui
agressent chaque weekend dans les stades européens, les footballeurs noirs en
les insultant, en faisant des cris de singe ou en jetant des bananes,
n’infligent pas seulement cette violence aux seuls footballeurs, mais ils
insultent plutôt tout un continent africain, y compris les jeunes amoureux du
football.
Cet état de fait regrettable doit nous amener à nous poser cette question: si un noir ne
peut pas se sentir à l’aise sur un terrain de football ou dans un stade sans être victime de la haine
raciste et de l’humiliation, bref de la violence physique et symbolique, où peut-il être bien dans sa peau
maintenant ? Quant à moi ma réponse est sans hésitation ni réserve
négative. C’est pourquoi les milieux du football doivent être considérés aujourd’hui
comme le premier lieu de combat et le principal front de lutte contre le
racisme dont les noirs sont victimes.
Au lieu de combattre ce type de racisme primaire, qui n’honore aucun être
humain, aucune société, nous assistons plutôt à sa banalisation et sa
persistance sous l’œil complice des dirigeants du monde entier, surtout
africains, la FiFa, et la CAF et la passivité, le manque de conscience de
solidarité des footballeurs noirs à l’exception quelques rares joueurs tel que
Lilian Thuram.
Par exemple Willy Sagnol, l’entraîneur de l’équipe de Bordeaux où il y a plusieurs footballeurs africains,
notamment le capitaine de l’équipe, a tenu des propos racistes, teintés de
préjugés et de clichés, visant les footballeurs africains, mais il n’a été
sanctionné ni par les dirigeants de son club ni par la fédération française de
football, malgré la dénonciation de certaines personnalité du football
d’origine africaines et européenne, notamment Pape Diouf et Claude Le Roi. Les
journalistes de l’émission de RFI Mondial Foot l’ont aussi beaucoup critiqué. Du
côté des footballeurs africains en activité dans le championnat, silence
radio ! Personne n’a réagi, y compris les joueurs africains de
Bordeaux. Or, une simple grève des
footballeurs africains paralyserait complètement le championnat français tout
en contribuant à mettre les joueurs à l’abri du racisme. Paul Pogba, footballeur français d’origine
guinéenne, élu meilleur footballeur junior du monde, a été aussi victime du
discours raciste du président de la Fédération italienne du football, mais la
victime, plus préoccupée de sa carrière, n’a réagi d’aucune manière. D’où le
silence coupable des footballeurs noirs qui contribuent beaucoup à la
persistance du racisme, car ils ont la notoriété et le pouvoir économique pour
s’ériger en défenseurs de l’ensemble des Noirs, notamment des immigrés ouvriers souvent victimes du racisme.
D’ailleurs dans un prochain article nous tenterons de démontrer comment le
sommet de la hiérarchie du football européen contribue à entretenir les
préjugés et les clichés sources du racisme visant les footballeurs noirs et
africains.
Dr Abdoulaye Wotem Somparé, sociologue et ancien footballeur amateur
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