La classe
politique est composée du gouvernement ou de la mouvance présidentielle et des
partis de l’opposition. Les premiers cherchent toujours à garder le pouvoir et les derniers cherchent
à y accéder. C’est de bonne guerre, mais tous les coups ne sont pas cependant
permis. C’est pourquoi la compétition
politique est régie par des règles, que tous les partis politiques sont tenus
de respecter afin de mettre la cité à l’abri des troubles sociaux et de
l’anarchie, sources de violence et d’insécurité. Or, dans le cas guinéen, les
manifestations politiques sont synonymes d’actes de violence et de vandalisme, qui se
traduisent par des agressions physiques des citoyens et des forces de l’ordre
et par la destruction des édifices publics, des biens et des personnes. Ces manifestations, auxquelles s'ajoute la grèved'aujourd'hui, privent
également les citoyens de certains services fondamentaux, notamment l’hôpital, les moyens de transport
et les magasins des commerçants au marché, qui sont souvent fermés en raison de la manifestation.
S’ils sont ouverts, toutes les populations ne peuvent pas s’y rendre parce que
les routes sont barricadées et bloquées par
des scènes de guérilla urbaine, opposant les jeunes des quartiers
déshérités et enclavés situés tout au long de la route de prince et
les forces de l’ordre. On oublie aussi
que les élèves et les étudiants, qui ont commencé les cours tardivement, souffrent
également de cette situation : à l’Université, par exemple, tous les cours
du lundi sont en retard.
Dans un contexte
d’absence de dialogue, les partis
politiques de l’opposition n’ont trouvé comme unique moyen de pression ou
d’accès au pouvoir que l’émeute et
la guérilla urbaine. C’est ainsi que les acteurs politiques guinéens ont
contribué à l’instauration en Guinée d’une culture politique de violence, qui a coûté la vie à des
centaines de leurs compatriotes, en majorité des jeunes issus de l’opposition. Ce sont toujours les mêmes débats stériles et
formels concernant l’organisation des élections qui sont à l’origine des
manifestations violentes et de la répression sanglante des forces de l’ordre.
Cette fois-ci, c’est autour du
reversement des calendriers des élections communales et présidentielles que les
deux camps s’opposent conformément à leurs
intérêts partisans respectifs. C’est la CENI qui a changé de manière
unilatérale le calendrier en programmant les présidentielles avant les
communales. Une telle décision est plus favorable à la mouvance présidentielle,
dans la mesure où la majeure partie des maires
sont plus proches du gouvernement que de l’opposition. Le président
compte certainement s’appuyer sur ces élus locaux à la base pour briguer un
deuxième mandat. Quant aux leaders de l’opposition, ils n’ont pas le droit de
manipuler et dresser les jeunes issus des quartiers de leurs fiefs de Kosa , Bambeto, Bailo
baya.
De plus, dans une situation de crise sanitaire, nous
pouvons nous interroger sur la pertinence et l’opportunité des manifestations
de l’opposition depuis deux semaines en Guinée. En
ce moment, la Guinée est confrontée à la
plus grave épidémie d’Ebola que l’Afrique n’ait jamais connu. Ebola, qui
menace notre survie tout en contribuant à notre isolement et
stigmatisation, devrait être le principal thème de débat du champ politique si nos leaders politiques étaient
responsables et patriotes. Ils auraient
dû en faire leur première préoccupation du moment, en le mettant au-dessus des
intérêts partisans et des clivages habituels. D’autant plus que les stratégies
de riposte contre Ebola en Guinée souffrent également de ce clivage et
bipolarisation politique à caractère ethnique et régionaliste. Sans attribuer
les réticences et les résistances à la stratégie de riposte seulement à des
facteurs politiques, nous pensons qu’il est parfois difficile d’adhérer aux
campagnes de sensibilisation pour des populations très méfiantes envers le
gouvernement. Par contre, en ce moment, l’unité nationale devrait être mise en
avant au-delà de tout clivage, et nos leaders, par leurs actions et leurs
discours, devraient donner un exemple de responsabilité et solidarité.
Dr A Wotem
Sompare.