Il y a peu de jours, “Eclairages
guinéens” avait souligné que le grand
rassemblement de Paris suite à la tuerie de Charlie Hebdo ne devrait pas
diviser le monde en deux grandes catégories, notamment ceux qui sont Charlie et ceux qui ne le sont
pas. Les participants à cette marche ont affiché une union et une solidarité internationale,
que le monde n’a peut-être plus connues
depuis la chute du mur de Berlin. Or, comme on l’avait souligné, dans cette
marche il y avait aussi tous ceux qui,
tout en condamnant le terrorisme, ne sont pas forcément d’accord avec l’esprit
de ce journal satirique. La preuve en est qu’un sondage récent prouve que 42%
des Français se déclarent contraires à la une de Charlie Hebdo qui caricature
le Prophète Mohamed. Maintenant les Occidentaux, au premier rang desquels se
trouvent des dirigeants tels que François Hollande, sont désagréablement
surpris de voir que certains dirigeants qui étaient à Paris ont interdit la publication
de « Charlie Hebdo » une fois de retour dans leurs Pays. Tel est le
cas des dirigeants sénégalais, nigériens, marocains, bref de la majeure partie
des Pays musulmans. En plus des déclarations officielles de la
majeure partie des Etats musulmans condamnant la publication de Charlie Hebdo
avec une caricature du Prophète Mohamed, il y a eu des émeutes et des soulèvements
populaires au cours desquels une dizaine d’églises ont été brûlées au Niger,
avec un bilan de dix morts. D’où l’amalgame paradoxal entre la ligne éditoriale
de Charlie Hebdo qui est un journal laïc,
voire athée, et le Catholicisme considéré en tant que religion du monde occidental. Or,
le Pape même a condamné les caricatures de Charlie Hebdo, en disant qu’il ne
faut pas tuer au nom de Dieu, mais qu’on ne doit pas non plus offenser la
religion d’autrui. Beaucoup de catholiques et laïcs européens ne sont pas d’accord avec la ligne
éditoriale de ce journal malgré la condamnation unanime du crime dont ont été victimes les membres de la rédaction. Donc, ceux qui protestent ont eu tort de s’en
prendre aux églises catholiques !
De plus, comme on le disait dans le deuxième article, la jeunesse africaine
ne doit pas transposer cette guerre de civilisation en Afrique. Elle ne doit
pas oublier non plus que François Hollande a combattu le terrorisme au Mali
dans l’intérêt de l’Afrique. C’est pourquoi il était d’ailleurs désagréablement surpris des manifestations à
Niamey et dans d’autres Pays africains. Cela montre encore une fois que les
dirigeants occidentaux persistent à faire de mauvais choix en ignorant les
réalités socioculturelles et la géopolitique des Pays en conflit. Pour reprendre Max Weber, on a l’impression que les
dirigeants des Pays Occidentaux agissent souvent au nom d’une rationalité
inspirée et dictée par la défense de valeurs, telles que la démocratie ou la
liberté d’expression. Même s’ils ont des intérêts économiques ou
géostratégiques cachés, c’est au nom de ces valeurs qu’ils ont soutenu, par exemple, les rebelles
syriens contre Bassar Al Asad ou qu’ils
ont favorisé la chute de Kadhafi en Lybie. C’est ainsi qu’ils ont déstabilisé
ces pays qui sont devenus ingouvernables tout en favorisant l’émergence d’un
nouveau groupe terroriste, l’Etat islamique.
Or, ces actions rationnelles par rapport à des valeurs ne le sont pas par
rapport à un objectif qui devrait être partagé par tous, c'est-à-dire
l’apaisement des tensions qui enflamment aujourd’hui le monde en empruntant
trop souvent la voie d’un choc des
civilisations. Pourquoi, par exemple,
insister avec la caricature du Prophète Mohamed au nom des valeurs au sens wébérien
du terme, sans se préoccuper des conséquences sur des populations peu
scolarisées et facilement instrumentalisées ? En se souciant de respecter les valeurs de tolérance et de laïcité
sans se soucier des conséquences, les rédacteurs de Charlie Hebdo, autorisés
par les dirigeants français, ont posé un acte irresponsable qui peut être facilement perçu comme provocateur.
Il est vraiment dommage de voir certaines populations africaines bruler aujourd’hui
les drapeaux de la France et en s’attaquant à ses installations de coopération
et à ses biens pendant la présidence de François Hollande qui a été toujours
présent quand l’Afrique eu besoin de lui, notamment au Mali, en Guinée et en
Centrafrique, en raison des amalgames et
des incompréhensions qu’on aurait pu surmonter avec une bonne communication des
uns et des autres. Il est aussi regrettable de voir le journal Charlie Hebdo,
qui critique régulièrement le Front national et le racisme en France en
défendant donc les populations étrangères, y compris les Africains, au centre et à l’origine de ces manifestations
violentes en Afrique. Ces soulèvements qui
ont déjà couté la vie à dix personnes en
raison de l’entêtement de la presse française par rapport à un idéal de liberté d’expression ressentie
comme une provocation chez beaucoup de musulmans.
Quant aux jeunes africains et surtout nigériens en particulier, comme nous
l’avons déjà souligné ci- haut, ils se trompent de lieu de combat en
s’attaquant injustement et aveuglement
aux Eglises où les frères et sœurs catholiques prient dans un continent où il y
a toujours eu une coexistence pacifique et un brassage entre les différentes communautés
religieuses enracinées dans l’animisme et syncrétisme africain . C’est pourquoi
les dirigeants des Pays africains devraient faire passer des messages apaisants
à leurs populations tout en leur expliquant que la satire de Charlie Hebdo n’a
rien d’une attaque des Catholiques contre les Musulmans. Il s’agit d’un journal
irrévérent envers toutes les religions et ses dérives ou provocations ne
doivent pas exposer à la violence nos frères et sœurs catholiques, qui ont le
droit de pratiquer leur foi comme ils l’ont toujours fait en Afrique, dans la
paix et dans le respect réciproque.
la situation paraissait un peu complexe au départ, mais finalement la clarté est là. la rationalité par rapport à une valeur est parfois l'objet d'agissement de chacun de nous au tant que l'action rationelle par rapport à une finalité.
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